Du 18 au 20 octobre avait lieu Paris Web, la conférence des professionnels du web passionnés par le web design, la qualité et l'accessibilité. (Rien à voir avec LeWeb, hein.)
C'était la troisième fois que j’y participais, non seulement en tant qu'auditrice, mais aussi et surtout en tant qu'oratrice, puisque Vincent et moi y avons présenté notre atelier « Les grilles macro-typo sur le web ? Facile ! ». (Oui, cet atelier a été filmé, mais on ignore quand la vidéo sera publiée.)
Altruisme
Chaque année, je sors éreintée mais heureuse de cet évènement incroyable. Cette année, c'est pareil, sauf que toutes mes émotions ont été exacerbées. Était-ce le stress intense de devoir prendre la parole devant mes pairs ? Était-ce la petite appréhension de rencontrer « en vrai » les personnes avec qui j'échange au quotidien sur Twitter ? Était-ce, tout simplement, la grande fatigue qui commençait à me retomber un peu sur la gueule, après un mois et demi de préparation intensive de notre atelier ? Mon expérience à fleur de peau s'explique sans doute grâce à tout ça.
Un côté de moi déteste tout ce qui ressemble de près ou de loin à une corporation, car, dans ma tête, esprit corpo = pression du groupe. Spontanément, je ne me sens appartenir à aucun clan, et j'ai toujours le sentiment d'être un peu à part, pas complètement dans le même trip, bref, de faire régulièrement des choix que ne feraient pas forcément les autres membres du groupe auquel je suis censée appartenir.
L'autre côté de moi ressent un vif pic d'adrénaline quand il a la chance de sentir qu'il fait partie d'un ensemble de personnes, toutes aussi passionnées, ouvertes, souriantes, motivées par l'envie d'apprendre, encore et toujours, et l'envie d'aller vers les autres, pour échanger et parfois enseigner. On ne vit pas ça tous les jours. Au quotidien, surtout quand on vit à Paris, on ressent assez cruellement la solitude du « 21st Century Schizoid Man ».
Bref. J'ai passé pas mal de temps à me demander pourquoi, ô grands dieux pourquoi, j'avais eu l'idée de proposer un atelier pendant cette édition de Paris Web, vu l'énorme stress que cela a engendré.
J'ai été super heureuse de rencontrer autant de personnes différentes, qui parfois venaient spontanément vers moi, avec un mot gentil. Je veux dire : QUI fait ça dans la vraie vie ?! Personne ! Paris Web est un peu une utopie, c'est vrai. De l'extérieur, je comprends que certains trouvent que ça fasse un peu « club élitiste », où tout le monde se connaît et se paluche de concert.
Mais la réalité est toute autre. Déjà, parce que les inscriptions sont ouvertes à tous, et que les places sont proposées à des prix modiques (si on compare avec d'autres évènements similaires, ça n'a juste rien à voir). Tous les orateurs sont bénévoles, ce qui explique en partie pourquoi le prix d'entrée est aussi accessible. Mais surtout, il y a une ambiance bon enfant, où tout le monde sourit au point d'avoir mal aux joues à la fin, où on est tous contents, vraiment contents d'être là, et où on apprend tellement de choses. Après, c'est vrai, il y a tout le gratin. Mais pas que. La preuve, il y a moi !
Personnellement, j'en ressors à chaque fois gonflée à bloc, et cette année c'est encore plus le cas, car la programmation des conférences était davantage orientée web design que les années précédentes. On a eu la chance d'écouter Mike Monteiro et Aarron Walter, mais je suis également sortie enrichie des conférences de Véronique Marino, Denise Jacobs, Dominique Sciamma et Marko Dugonjić.
Histoires et savoir
Le mot d'ordre cette année semblait être « Racontez des histoires et partager votre savoir ». Deux points qui me touchent directement.
Partager son savoir, prendre la parole, demande du courage. Quand on en écoute certains parler, on se dit qu'ils ont ça dans le sang, qu'ils ont de la bouteille, que c'est leur truc. Mais même les rockstars ont vécu « la première fois », la première prise de parole en public, et croyez-moi, même eux ont eu le trac. Savoir ça, ça permet de prendre un peu de recul.
Il est important que vous partagiez vos connaissances. Même – et surtout ? – si vous vous êtes cassé la gueule à un moment donné : parler des difficultés que vous avez rencontrées est immensément bénéfiques pour ceux qui vous écoutent. Personne ne réussit rien sans rater à côté certaines choses. C'est humain. Ceux qui prétendent n'avoir jamais rien raté dans leur vie sont des imposteurs.
La question qui se pose, c'est de savoir quelle est la légitimité qu'on a à prendre la parole, à écrire, à enseigner. Relents du syndrôme de l'imposteur dont nous sommes nombreux à être atteints (et je sais de quoi je parle). Le simple fait d'oser prendre la parole, de publier un article technique, vous rend légitime. Parce que tout le monde n'ose pas, justement. Nous avons tous quelque chose à partager, à notre niveau. Et les gens qui vous lisent, qui vous écoutent, ne le font pas pour vous faire plaisir : ils le font sciemment, parce que ça les intéresse vraiment.
Même en ayant tout ça en tête, j'étais quand même ultra stressée de prendre la parole à Paris Web. J'étais très motivée, car Vincent et moi avons l'habitude de travailler ensemble, et utilisons des outils et des méthodes que nous avons éprouvés au fil du temps, que nous utilisons chaque jour, et qui nous ont permis de créer de supers sites web.
Je savais que le sujet de notre atelier méritait qu'on en parle publiquement, parce que les grilles sur le web ne sont pas encore vraiment rentrées dans les habitudes des web designers – d'aucuns jugent qu'elles seraient même inutiles –, et je trouvais intéressant que même ces web designers-là assistent peut-être à notre atelier, et aient la curiosité d'écouter, pendant 1h30, ce que nous avions à dire sur le sujet.
Mais bon : comment parler de design ? Par quel bout aborder ça ? Quand on parle de code, ça va à peu près, car on peut s'appuyer dessus, c'est une base solide (quoi qu'il existe toujours plusieurs façons de coder pour aboutir au même résultat). Mais comment parler de design ? Comment intéresser ceux qui vous écoutent, quel langage adopter, et quels exemples donner ?
J'ai opté pour l'histoire, justement. Histoire de l'écriture, de l'architecture, de l'art, du graphisme. Cela me semblait important de revenir sur ce passé extraordinaire dont nous sommes les héritiers, et dont nous devons nous montrer dignes.
À ce titre, je suis absolument en phase avec Mike Monteiro quand il dit que, tout design a des répercussions dans le monde, et qu'être designer, c'est avoir une responsabilité vis-à-vis du monde. Ce n'est pas quelque chose à prendre à la légère, et c'est un réel métier : on ne naît pas designer, on le devient. Si vous n'êtes pas impliqué émotionnellement dans ce que vous faites, laissez tomber.
Au final, nous n'avons eu que des retours positifs, que ça soit sur Twitter ou de vive voix ! Ce qui fait quand même super plaisir, et efface en quelques secondes tout le stress, toute la fatigue, toute l'appréhension que nous avions accumulés ces dernières semaines. Encore un grand merci à celles et ceux qui sont venus nous écouter !
Tisser des liens
Partager, échanger, permet d'atteindre un niveau d'altruisme et d'empathie assez extraordinaire. Depuis mes 17 ans, je partage sans relâche, bénévolement, sincèrement, mes coups de cœur culturels, soit sur mon webzine, soit sur mon blog, soit de vive voix. Je suis passionnée, et je suis capable de vous parler avec amour de la perfection d'un macaron au citron ou de l'impact d'un disque dans ma vie pendant des heures. J'ai toujours eu – et j'ai encore ! – envie de partager ce qui m'anime, et ce qui donne du sens à ma vie.
Je crois avoir, cette année, franchi le pas et commencé à partager davantage mes connaissances professionnelles. Timidement, pour le moment, j'ai publié un article consacré à l'optimisation de @font-face sur le blog de Clever Age, devrait publier un article sur Le Train de 13h37 bientôt, et un autre chez Les Intégristes. J'aimerais publier davantage d'articles techniques sur mon blog.
Quant à d'autres interventions en public, qui sait… :-)
Parler à Paris Web m'a certes coûté beaucoup en terme de confiance en moi. Ce n'était pas que partager mes connaissances : c'était un rite de passage, à plus d'un titre.
D'une part, un rite intellectuel – prendre la parole devant ses pairs, dont des personnes beaucoup plus expérimentées que moi, au cœur d'une conférence pour laquelle j'ai beaucoup d'admiration.
D'autre part, un rite physique – puisque ce fut également l'occasion d'être filmée, écoutée et regardée pendant 1h30, choses avec lesquelles je ne suis pas forcément très à l'aise.
Enfin, un rite de passage émotionnel – parce que ce fut l'occasion de tisser un lien nouveau avec autrui, et de ressentir un million de choses en l'espace d'1h30. C'est une expérience unique, que j'aurais du mal à décrire précisément, parce que cela relève de l'intime et que mon vécu est évidemment très personnel. En tout cas, pour moi, ce fut un dépassement.
Tout ça pour dire qu'une fois encore, mes batteries intellectuelles sont rechargées. Mon corps, lui, va avoir besoin de quelques jours semaines pour retrouver son énergie. Mais que d'inspiration et que d'idées accumulées en trois jours !
La mauvaise nouvelle, c'est que je vais remanier quelques aspects de mon portfolio à la lumière de ce que j'ai appris à Paris Web. De toute façon, cela fait longtemps qu'on n'est plus à deux ou trois mois près, hein ? ^^
28 octobre 2012
Bonsoir Marie,
Je viens de lire ton article et je ressens encore beaucoup d'émotion au travers de ces lignes.
J'aurais tant aimé te voir en live...Mais je me contenterai de la vidéo dès qu'elle sera en ligne.
J'ai souri en lisant ceci "Personne ne réussit rien sans rater à côté certaines choses." parce que ça rejoint exactement l'état d'esprit dans lequel je suis en ce moment, tous ces questionnements sur la créativité et notre cheminement pour atteindre un certain résultat...
Je te link cette video d'ailleurs qui traite le sujet, la conférencière est écrivain et veut dédramatiser l'échec et toute cette pression qu'on met sur le dos de la créativité.
J'aimerais tant échanger plus longuement avec toi sur ce sujet...
En tout cas, je suis très contente de voir ce que tu atteins et que tu prends toujours autant de plaisir à partager tes passions ! Je suis très impressionnée par le chemin que tu as parcourue depuis que je te connais...Mais ça ne m'étonne qu'à moitié ;)
Je languis de découvrir ton prochain portfolio et échanger autour d'un thé et un cookie géant =^_^=
28 octobre 2012
Bravo Marie! J'aurais beaucoup aimé y assister, si j'avais su.
(Je suis allée y faire un tour, mais dans le public.)
J'attends la vidéo avec impatience.
Je suis sûre que tu es une oratrice parfaite, connaissant tes qualités pro et humaines.
28 octobre 2012
Hello Marie,
Eh ben voilà, tu es initiée, tu as passé le rite ! :-) C'est toujours la première fois la plus dure, mais rassure-toi, on devient vite accroc à ces partages en prise directe avec un auditoire.
Et puis cet atelier était vraiment très bien. On se sert de certains de ses conseils en ce moment pour mettre au point une grille potable pour notre nouveau front, alors…
J'espère donc (et je suis confiant) que tu remettras le couvert à diverses occasions, et au plus tard à Paris Web 2013 :-)
Bises,
30 octobre 2012
Chouette, des commentaires ! ^_^
@Kyranthia : je suis toujours partante pour papoter autour d'un bon repas (surtout maintenant que j'ai trouvé le meilleur cheesecake de Paris – oui, meilleur que chez Lacombe) ! Donc, si tu as une petite place dans ton agenda de ministre, fais-moi signe ;-) car je crois en effet qu'on commence à avoir pas mal de choses à rattraper !
Ah, ces cerveaux qui, une fois qu'ils se sont rencontrés, n'arrêtent jamais de communiquer… :-)
@Claire : youpi, ça me fait super plaisir que tu commentes ici ! Merci pour ce joli commentaire qui me fait rougir :*) J'espère qu'on aura l'occasion de se voir bientôt !
@Christophe : Merci pour tes compliments, venant de toi cela me fait très, très plaisir ! Jérémie m'avait prévenue qu'on devient vite accro, tu me confirmes, et je dois pour ma part avoir déjà commencé une petite liste de sujets potentiels pour de futures interventions ! Oui oui, je suis bien celle qui disait « PLUS JAMAIS », mais bon, il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis hein !
En tout cas Paris Web était, une fois de plus, un immense moment, ça a été pile le coup de boost qu'il me fallait en cette fin d'année.
Bref, MERCI !
31 octobre 2012
Un de mes grands regrets de staffeuse de cette année est bien d'avoir loupé votre conf mais heureusement la vidéo est là \^o^/
Je suis contente que cette édition t'aie plu et surtout je suis très heureuse que cette prise de parole t'aie donné envie de continuer. Je trouve que tu es une oratrice prometteuse : bonne élocution, bonne gestuelle, esprit organisé et surtout un paquet de choses intéressantes à raconter de façon intéressante ! Bref t'es foutue : te voila obligée de repasser plus souvent de l'autre côté du micro !
Bises
11 novembre 2012
Salut Vi ! Merci pour toutes les choses gentilles :-) Quant à de futures interventions publiques, il ne faut jamais dire jamais, il paraît!
Bises !
M
18 novembre 2012
Salut Marie,
Je fais partie de ces personnes avec qui tu a s échangé quelques tweets et j'avais déjà pu apprécier le ton de ce blog.
J'y suis revenu en cherchant un article auquel un twittos faisait allusion, que j'ai trouvé sur http://letrainde13h37.fr/26/aide-toi-le-web-aidera/, et qui développe ce qui germe dans cet article.
Bravo ! Autant pour le partage d'information qui fait apparaître ton humanité avec toutes les faiblesses que cela peut comporter - comme nous tous - autant cela éclaire autrement la relation (communication physique ET communication web) entre les individus.
28 janvier 2013
Merci beaucoup Yann ! :)